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Sophie Lecron (PTB+) :"Trop de taches bleues font disparaitre votre rouge déjà bien pâle"

Intervention de la cheffe de groupe PTB+ au conseil communal sur le budget 2017 de la Ville de Liège.

Monsieur le bourgmestre, mesdames messieurs les échevins, chers conseillers,

Nous voici à l’avant-dernier exercice budgétaire de cette mandature et de sérieuses menaces pèsent sur les finances communales de la Ville. Si les budgets sont présentés à l’équilibre, autant dire que ces équilibres sont pour le moins instables. En effet, ils sont tributaires d’une nouvelle négociation avec le CRAC, notre FMI régional, et cela pour l’octroi d’un nouvel emprunt, de moins en moins extraordinaire, pour les cotisations de responsabilisation. Pour rappel, la dernière version du plan de gestion présentée l’année passée annonçait des mesures de restrictions budgétaires cumulées 2017-2020 de 13,7 millions d’euros1. Une nouvelle négociation avec le CRAC aura donc un prix et je suis certaine que ça sera un nouveau train de restrictions budgétaires qui sera imposé aux Liégeoises et aux Liégeois. Je continue à me demander où se trouve la gauche dans cette majorité dite de « centre-gauche ». Les budgets sont – semble-t-il – à chaque fois plus cdH que PS ou disons que les taches bleues de ces budgets sont de plus en plus grandes …

Première tache bleue : la politique du personnel. Les dépenses augmentent de 4,5 millions et le collège insiste sur l’absence de licenciement et sur, je cite et c’est la même phrase depuis 2 ans, « la poursuite des nominations à hauteur de 50 % de l’effectif ». Or, que constate-t-on ? Depuis 2010, un cadre a été fixé à 2899 ETP. L’objectif des plans de gestion exigés par le CRAC était donc de ramener l’effectif du personnel à ce cadre d’ici 2016. Or, sur base des derniers chiffres en notre possession (tableau du personnel du 08/06/2016), la Ville emploie 2894 ETP (donc 5 ETP en-dessous du cadre) et surtout avec 1369 nommés, soi 47,3 % de l’effectif actuel. Madame Yerna pourra peut-être nous dire si depuis juin nous sommes revenus à 2899 ETP et à 50 % de nommés. Mais en tous les cas, ce qui est certain, c’est que l’on a détruit, entre 2010 et 20162, 246 postes de travail. Je répète 246 postes de travail ont disparu.

Cela, je vous l’avez déjà dit l’année passée, mais ce qu’il y a de nouveau cette année. Et c’est là que l’on voit l’effet dévastateur de ce carcan de 2899 ETP. On ouvre de nouvelles crèches à Liège et c’est une chose positive (une tache rouge :-), ce qui crée un besoin en puéricultrices. Mais à cause de ce carcan, l’augmentation de 75 puéricultrices depuis 2010 a dû être compensée par la perte de 80 postes de travail dans la filière personnel ouvrier et d’entretien. Ce sont bien sûr des offres de services publics en moins : service de signalisation, service de dératisation (cf. Boverie), service des plantations … Ou alors une qualité de service moindre qui repose sur une plus grande flexibilité du personnel : les fossoyeurs de la Ville de Liège doivent maintenant, en plus de la gestion des inhumations, participer aussi à l’entretien des allées des cimetières. Bref, ce carcan du CRAC est inacceptable pour nous. Une politique de gauche se doit de coller en permanence aux besoins des gens, et non obtempérer au diktats de notre FMI local …

Deuxième tache bleue : la fiscalité locale. La réforme de la taxe déchets se révèle un leurre. La baisse de la partie forfaitaire, payée par tous les ménages, est complètement financée à partir de cette année par l’augmentation de la partie variable liée à la vente de sacs supplémentaires. Et pendant ce temps-là, la quantité de déchets ménagers résiduels (DMR) continue de stagner au-dessus de la barre symbolique de 200kg/habitant (201kg/habitant exactement en 2015 selon le dernier rapport annuel d’Intradel3). Comparé aux comptes 2012, la partie forfaitaire a baissé de 1,121 million d’euros alors que la partie mobile a augmenté de 1,160 million d’euros. Qui sont les personnes qui achètent des sacs supplémentaires ? De mauvais trieurs ? Ils doivent être quelques uns sans nul doute. Le sont-ils tous ? Il est permis d’en douter. Le nombre forfaitaire de sacs jaunes ne fait la distinction qu’entre isolés, ménages de 2, 3 ou 4 personnes et ménages de plus de 4 personnes. L’introduction des sacs biodégradables n’a fait baissé les DMR que de 3 %. Cela reste faible. Au-delà de la progressivité de la taxe déchets à laquelle nous sommes attachés, nous pensons que budgéter deux années de suite 2,3 millions d’euros de vente de sacs jaunes supplémentaires témoigne d’une acceptation de cet état de fait : toujours plus de 200kg/habitant. Nous pensons donc qu’il faut réagir et changer son fusil d’épaule en organisant de meilleures campagnes d’information sur l’importance du tri et en récompensant plus significativement les bons trieurs.

Toujours en terme de fiscalité locale, nous sommes toujours aussi remontés contre l’explosion des recettes liées au stationnement. Encore 200.000€ de plus comparé à 2016. Mais surtout, c’est carrément plus 42 % si l’on compare aux comptes 2012. Est ce que la mobilité à Liège s’est améliorée ces cinq dernières années ? Est-ce que l’offre de services publics de bus ou de train a augmenté ? Est ce qu’il y a plus de parkings de délestage à l’entrée de la ville ? La réponse est 3 fois non. La promesse faite au CRAC dans la dernière actualisation du plan de gestion d’étendre la zone de stationnement payant est apparemment plus importante que la promesse faite aux Liégeois d’une meilleure mobilité dans leur ville.

Au niveau des additionnels, si le collège se félicite de ne pas augmenter les taxes, il oublie de dire que le taux appliqué au Précompte Immobilier a augmenté il y a deux ans pour passer de 2870 à 2990. Cette augmentation est substantielle et concerne 50 % des Liégeois propriétaires de leur habitation. La non-mise à jours des informations cadastrales datant de 1975 rend cela encore plus injuste pour nombre de Liégeoises et Liégeois.

Enfin, je veux terminer ce chapitre fiscal en soulignant positivement que la ville compte augmenter le recouvrement des taxes sur les secondes résidences comme les taxes sur les immeubles inoccupés ou délabrés. Ces quelques taches rouges font quand même plaisir parce que ce sont 980.000€ qu’on n’ira pas chercher dans la poche des travailleurs.

Voir en annexe le tableau des recettes fiscales de la commune par catégorie.

Troisième tache bleue : les recettes de prestations. Dans la dernière actualisation du plan de gestion, vous nous annonciez pour 2017 la collecte de 250.000€ supplémentaires à travers la révision du règlement tarifaire d’occupation des infrastructures communales. Cela signifie la fin de la gratuité ou des tarifs préférentiels pour les particuliers et les associations. Dans le budget de cette année, les 250.000€ escomptés ne sont pas encore totalement là mais on peut déjà y retrouver une augmentation des produits de la location du mobilier relatif au Point Vélo des Guillemins (de 16 473€ en 2015 à 45000 en 2017), une augmentation des produits de la location des locaux scolaires (20 943 en 2015 à 30 000 en 2017), une augmentation des droits d’entrée dans les infrastructures sportives (Constitution 12 429,75 (2015) > 43 739,00 (2017), Centre Sportif d’Outremeuse (82 351,00 (2015) > 217 000,00 (2017) ) mais également une augmentation des interventions des parents dans la surveillance et les cours de l’Enseignement de promotion sociale (306 137,88 (2015) > 339 043,00 (2017)) ainsi qu’en milieux d’accueil (1 789 170,35 2 (2015) > 2 273 250,00 (2017)) , augmentation difficilement explicable par l’unique augmentation du nombre de places, sans oublier enfin l’augmentation des produits des droits d’entrée aux musées survenue l’année passée (55 797,18 > 171 000,00). Bref, on va chercher dans la poche des usagers des services publics communaux : associations, parents, jeunes, amateurs de sport ou de culture, tous vont passer à la caisse. Après, on viendra nous dire que la Ville préserve notre pouvoir d’achat …

Quatrième tache bleue : les investissements. Globalement, ils restent pour nous limités. Même si trois investissements majeurs seront faits, hors-balise imposée par la région wallonne. Les 6,1 millions consacrés à la rénovation des bâtiments communaux (projet RENOWATT) sont une avancée positive mais le retard pris est grand et avec ce rythme, les bâtiments communaux, en particulier les implantations scolaires, ne seront pas rénovées avant une trentaine d’années… Soulignons par ailleurs que le patrimoine immobilier est de plus en plus rénové par la vente de bâtiments communaux (encore 3,567 millions d’euros en 2017) … D’autres choix publics sont possibles, notamment grâce à la constitution d’une société publique de rénovation et de construction.

Cinquième et dernière tache bleue : ce sont les risques qui pèsent sur les finances communales. Le tax-shift de la suédoise va coûter cher à la ville de Liège : elle perdra 162.000 euros en 2016, 737.000 en 2017, 824.000 en 2018, 480.500 en 2019, 1.4 millions en 2020 et 944.000 euros en 2021 : un total de 11 millions d’euros. Ou comment les pseudos « jobs, jobs, jobs » se transforment en austérité imposée aux communes. Autre menace, les cotisations de responsabilisation. Et là, la responsabilité est celles de toutes les majorités qui se sont succédées à la Violette depuis les années 80. Le budget nous est aujourd’hui avec 23 millions encore à chercher et à négocier avec le CRAC. C’est de l’irresponsabilité.


 

Pour toutes ces taches bleues, nous allons voter contre ce budget.