C’était juste avant les fêtes de fin d’année. La direction de l’hôpital de la Citadelle à Liège a décidé d’économiser 12 millions d’euros, dont plus de 5 millions à charge du personnel et des patients. Mais la résistance s’organise. Après une journée de grève et une manifestation de 1000 personnes le 25 janvier, le personnel est en grève ces 1er et 2 février.
LE PLAN DE LA DIRECTION
Suppression du forfait de 11 % pour les prestations inconfortables et diminution de la prime de fin d’année. Certains travailleurs pourraient perdre jusqu’à 250 euros par mois, pour faire le même travail. Mais du côté de la direction, Mr Degotte, directeur financier, reconnaît sans gêne que sa rémunération dépasse le barème légal.
Suppression de 35 emplois. Résultat, la charge de travail va augmenter. D’autant plus que la direction prévoit aussi pour faire rentrer de l’argent d’augmenter l’offre de consultations, d’ouvrir des lits supplémentaires, d’augmenter le nombre de prestations et d’opérations. Tout ça avec moins de personnel ! L’engagement quotidien de tous les travailleurs de l’hôpital mérite mieux que ça.
Quant aux patients, ils devraient payer plus cher les suppléments d’honoraires pour chambre particulière et le montant facturé en cas de non-présentation à un rendez-vous. Il a aussi été question de fermer le Centre d’accueil pour handicapés CIMC, mais grâce aux protestations des travailleurs et des familles des enfants, ce drame a pu être évité.
CE N’EST NI AU PERSONNEL, NI AUX PATIENTS DE PAYER.
Le personnel refuse ce plan. C’est aussi parce qu’il ne veut pas avoir un drame sur la conscience, parce que le patient est sa priorité que le personnel se bat. La direction pèse sur la conscience professionnelle pour en demander toujours plus : elle sait que le personnel fait passer avant tout les soins aux patients et hésite à se mettre en grève. Mais trop, c’est trop… La qualité des soins est menacée. Régulièrement, des travailleurs signalent que la sécurité des patients est en péril, mais ils ne sont pas entendus. Parce qu’ils ne veulent pas d’un drame, ils le crient donc haut et fort à l’extérieur, au public, aux politiques.
IL Y A DE L’ARGENT
Le conseil d’administration, composé en grande majorité de représentants politiques du PS, du MR, du cdH et d'Ecolo a approuvé le plan d’économies. Est-ce le seul plan possible ? Un examen des comptes montre qu’il y a de l’argent : 90 millions de réserves. S’il faut vraiment faire des économies (ce qui reste à prouver), on peut dans un premier temps puiser dans ces réserves. Les 12 administrateurs les plus importants qui font partie du « bureau permanent » se partagent annuellement 307 835 €. Les 8 équivalents temps plein de la direction se partagent à eux seuls 1 074 818 €. Et si avec ça ils n'ont pas encore assez, ils peuvent réduire le nombre de nouveaux postes de direction ou de missions de consultance, ou encore arrêter les travaux de prestige à l’étage de la direction.
UNE QUESTION DE CHOIX POLITIQUES
Le CHR de la Citadelle n’est pas le seul à décider d’un plan d’économies. Les hôpitaux de Namur et Huy ou du Bois de l’Abbaye à Seraing sont aussi touchés. Le gouvernement fédéral impose des mesures drastiques dans le secteur des hôpitaux. La ministre de la Santé, Maggie De Block s’inscrit dans une logique de rentabilité et de marché qui ne tient pas compte des besoins de la population. Mais en validant le budget, le Conseil d'Administration du CHR rentre dans la même logique que ce gouvernement, qu’il qualifie par ailleurs d’anti social ! Bel exemple de double discours ! En Grande-Bretagne après 7 ans de coupes budgétaires les hôpitaux et tout le système de soins de santé public est exsangue. Tandis qu'un système privatisé à deux vitesses se développe toujours plus pour ceux qui ont les moyens. « Urgence aux urgences », titrait le 29 janvier le journal populaire Bild Zeitung en Allemagne. Le 30 janvier, 1000 maisons de repos étaient en grève en France. Voilà les conséquences dramatiques des politiques libérales d'austérité et de privatisation aujourd'hui. Le profit et les intérêts d'une minorité avant tout. Et c'est la même voie prise ici par le gouvernement Michel et la ministre De Block.
UN AUTRE MODÈLE EST POSSIBLE : LE MODÈLE KIWI
Il y a moyen de trouver des marges dans la sécurité sociale tout en maintenant la qualité des soins et sans mettre la pression sur le personnel. Le modèle kiwi (qui organise des appels publics d’offre à l’échelle nationale pour l’achat de médicaments, de matériel médical, d’appareils d’imagerie médicale et de laboratoire) rapporterait au moins 2 milliards d’euros. On peut encore économiser près de 2 milliards d’euros sur les rémunérations faramineuses des spécialistes, en généralisant le système de paiement des hôpitaux universitaires. Enfin, éviter les examens superflus en supprimant le « paiement à la prestation » rapporterait 0,8 milliard d’euros.
ENSEMBLE, ON PEUT GAGNER
Les actions ont déjà fait reculer la direction. Après le premier arrêt de travail, elle a modifié sa position sur les 11 %. Mais d’une façon qui ne met pas tout le personnel sur le même pied. Autrement dit, elle veut diviser pour mieux régner. Mais jusqu’à présent, les travailleurs sont restés unis. Respect à tous ceux et celles qui défendent des soins de santé de qualité et accessibles pour tous. Pas question de lâcher le morceau, on continue le combat.
Jeu trouble au conseil communal
Au conseil communal de Liège le 29 janvier, le PTB a voulu déposer une motion de soutien aux travailleurs de la Citadelle. Quelle affaire ! Raison invoquée pour ne pas prendre en compte la motion: on n'a pas à discuter des intercommunales dans un conseil ... communal ! Incroyable. Après Publifin et le manque de transparence qui a été mis à la lumière il y a un an, il y a des bourgmestres et conseillers communaux qui trouvent encore qu'il ne faut pas parler des intercommunales dans les conseil communaux. Pourtant, on a déjà dans le passé discuté de questions liés à des intercommunales, dont notamment Publifin, mais aussi les pompiers , l'A.I.D.E ou encore ISoSL. Mais quand il s'agit d'une interpellation ou motion du PTB, on interprète le règlement différemment visiblement. Enfin bref, après un long débat ... ils ont accepté que le point "soit mis à l'ordre du jour". Mais la motion (texte complet sur liege.ptb.be) n'a pas été votée et a été renvoyée en commission par le bourgmestre. Raison évoquée : "pour donner sa chance à la concertation sociale". Mais justement pour donner cette chance, nous devons soutenir les travailleurs dans leurs justes revendications. Les partis traditionnels ne changeront d'avis que si les travailleurs ne lâchent rien de la mobilisation.