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Conseil Commun CPAS-Ville 2024 : intervention de Quentin Vauchel (PTB)

Conseil Commun CPAS-Ville 2024 : intervention de Quentin Vauchel (PTB)

Intervention du chef de groupe PTB au conseil du CPAS de Liège, Quentin Vauchel, au Conseil Commun CPAS-Ville du mardi 23 avril 2024.

À l’heure de parler de synergies entre Ville et CPAS, nous souhaitons avec le PTB vous adresser quelques recommandations et avertissements. En effet, si nous saluons toute collaboration entre nos deux entités qui aurait pour but une amélioration de l’offre de service public envers des Liégeois et Liégeoises, parler de collaboration ne doit pas cacher une triste option qui serait celle des économies budgétaires et de la rationalisation de l’offre.

Premièrement, si nous saluons les initiatives qui visent à fluidifier le passage d’un service communal à un service du CPAS (et vice-versa). Si nous appelons de nos vœux un renforcement de l’accessibilité au service, une politique visant à faciliter le passage d’un guichet à l’autre en économisant le temps et l’énergie des personnes confrontées à une multitude de démarches, il ne peut être question que développer des synergies ait pour répercussion de diminuer l’offre aux Liégeois et Liégeoise. L’étendue de notre commune oblige à développer une offre centralisée, mais aussi à poursuivre une politique d’offre complémentaire de manière décentralisée, via notamment les antennes de quartier du CPAS et les mairies de quartier. Une attention particulière doit être également accordée au cadre de travail des travailleurs, à qui il faut offrir des locaux adaptés, remis à neuf en certains endroits et sécurisé. L’accueil des bénéficiaires doit également être optimisé. Trop souvent, de longues files se forment devant la cité administrative ou la Place Saint-Jacques démontrant une politique d’accueil à améliorer.

Deuxièmement, la politique du logement doit faire partie intégrante d’une collaboration pleine et entière entre Ville CPAS. Face à l’augmentation du nombre de sans-abris, pour rappel, le nombre est estimé au moins 700 personnes, sans compter ceux que l’on appelle les « mal-logés », ville et CPAS doivent travailler ensemble à des concepts comme Housing First afin de mettre la priorité sur le retour au logement, tremplin vers la réintégration sociale. Ville et CPAS doivent aussi travailler à la construction et rénovation de logements sociaux et à l’accès au logement pour toutes et tous. Pour rappel, à Liège, le marché des logements privés règne en maître avec à peine 7 % de logement publics. Une politique du logement social au niveau local doit être mise en place au travers de la préservation et de la rénovation du bâti déjà en possession des pouvoirs publics ; de l’imposition d’un quota de 30% de logements sociaux dans tout nouveau projet immobilier et de la mise en place d’une grille contraignante des loyers sur le territoire de notre commune. Enfin, face au nombre de logement inoccupé qui parsèment l’ensemble des rues de notre ville, il faut établir un cadastre clair des biens volontairement vides et si nécessaire procéder à des réquisitions.

Enfin, si des synergies doivent exister entre nos deux entités, il est cependant nécessaire que les politiques sociales menées par le CPAS continuent de jouir d’une autonomie. Il ne pourrait être question que sous un argument financier, les actions menées par le CPAS deviennent soumises à une variable budgétaire de l’autorité communale.

A l’heure de clôturer cette législature, nous pouvons dresser un premier bilan des politiques sociales qui ont été menées sur le territoire de notre commune durant la dernière législature.

La situation des CPAS, qui ont été créés, il est utile de le rappeler, dans le but de garantir à toutes et tous un droit à la dignité humaine, est un bon indicateur de la croissance sans fins des inégalités dans notre société. Le nombre de bénéficiaires du revenu d’intégration sociale a augmenté de 30 % dans notre région au cours de la dernière législature communale. Les jeunes et les femmes isolées avec enfants sont encore les premières victimes des politiques néolibérales en œuvre depuis plusieurs décennies. Ces dernières semaines, plusieurs articles ont parsemé la presse sur l’augmentation du nombre de sans-abris dans notre ville. Si cette augmentation peut être difficilement objectivable, il suffit de se promener dans les rues de notre ville pour constater la précarité grandissante. Au mois de mars dernier, nous avons dû déplorer le décès de 7 personnes dans nos rues. Et ceci ne semble pas provoquer l’émoi de ceux qui nous gouvernent. Il ne vous aura peut-être pas échappé que nous traversons une crise économique qui touche durement l’immense majorité de notre population. La précarité énergétique se fait également grandissante. Au moins un ménage sur cinq court le risque de subir cette forme de précarité et ne peut donc couvrir ses besoins nécessaires en chauffage, éclairage, électricité. En avril dernier, des centaines de personnes manifestaient à Liège pour dénoncer le mal-logement. Trop nombreuses sont les personnes qui, aujourd’hui, doivent faire face à un logement mal adapté à leur composition familiale, mal isolé, humide… Et ces situations ne cessent de croître. La triste voie de la précarisation suit le même chemin dans le domaine des soins de santé, de l’alimentation, de la scolarité… Près d’un ménage sur cinq en Wallonie est en risque de pauvreté et un enfant sur quatre vit dans une famille qui dispose de ressources en dessous du seuil de pauvreté.

Face à ce constat, il est nécessaire d’agir déjà au niveau local, et ce, sans attendre une réaction qui se fait lente à d’autres niveaux de pouvoir. Nos travailleurs sociaux ont actuellement en charge en moyenne une centaine de dossiers sociaux. Dans ces conditions, il n’est pas possible d’offrir un accompagnement adéquat aux personnes qui sollicitent l’aide de la part de notre CPAS. Nos travailleurs, mais aussi les bénéficiaires sont en permanence à flux tendu, ce qui se montre aussi par d’une part, pour les travailleurs de notre centre, un turn-over important, et d’autre part, pour les bénéficiaires, à un phénomène du non-recours de plus en plus présent.

Dans tout ce contexte, le financement des centres d’action sociale est également instable. Le revenu d’intégration sociale, que l’on ferait mieux d’appeler le Revenu de Survie, est actuellement remboursé par le Fédéral à hauteur de 70 %. Les 30 % restants sont à charge de la ville et du CPAS. Pour le PTB, le RI devrait être pris en charge à 95 % par le Fédéral, comme le revendique la Fédération des CPAS Wallons. Jusqu’à présent, les partis politiques de la majorité liégeoise sont au pouvoir au niveau fédéral. Il convient également de relever toutes les allocations sociales au-dessus du seuil de pauvreté et de mettre fin à des considérations d’un autre temps en individualisant les droits des allocataires.

Si c’est encore le cas demain, prenez vos responsabilités !

Les politiques néolibérales des dernières décennies ont également profondément modifié le travail social mené dans les CPAS. Le contrôle qui est maintenant demandé aux travailleurs sociaux non seulement accroît profondément leur charge de travail, mais est aussi profondément injuste pour eux-mêmes et les bénéficiaires de l’aide. Les travailleurs sociaux ne s’engagent pas dans cette profession pour fliquer des gens, mais bien pour être agent d’aide et de changement. Pour permettre aux travailleurs sociaux de réellement faire le travail pour lequel ils se sont formés des aberrations comme le PIIS doivent être supprimé. Pour lutter contre la charge, mais également pour plus de justice sociale, il est nécessaire de supprimer le taux cohabitant et d’instaurer un revenu d’intégration individualisé.

Des actions de solidarité se multiplient aujourd’hui dans la population. Nous soutenons celles-ci et nous y participons. Cependant, les personnes les plus démunies ont besoin d’un accompagnement public global, solide et avec une offre bien supérieure à ce qu’elle est pour le moment. Une priorité pour la prochaine législature doit être le recrutement de dizaine de nouveaux travailleurs sociaux, mais aussi une politique du bien-être au travail active afin de lutter contre le turn-over. Bien entendu, les différents points abordés ici ne pourront se régler avec le seul niveau communal. Cependant, vous avez des choix politiques à faire. Voulez-vous une commune qui subit les choix posés ailleurs ou au contraire, voulez-vous une commune qui soit pionnière et qui sert de levier pour des changements politiques à différents niveaux ?

Je vous remercie.