PST : un plan hors du temps mais inscrit dans l'austérité des gouvernements MR-Engagés

PST : un plan hors du temps mais inscrit dans l'austérité des gouvernements MR-Engagés

Conseil communal du 29 septembre 2025

Ce lundi 29 septembre, la majorité PS-MR-Engagée présentait son Plan Stratégique Transversal (PST) au conseil communal. Rafik Rassaa, conseiller communal PTB, a pris la parole au nom du groupe PTB, pour exprimer les critiques, les craintes et les menaces qui pèsent sur l'exécution de ce plan. Voici le texte de son intervention.

Monsieur le Bourgmestre, Mesdames et Messieurs les Échevins, 

Depuis la déclaration de politique communale en février dernier, la situation de notre ville, de notre région et de notre pays a fortement évolué. Depuis plus de 6 mois, on déroule sous nos yeux un catalogue de mesures d’austérité qui impactent lourdement, à tous les niveaux, les citoyens et citoyennes, et qui touchent de plein fouet les liégeois et liégeoises. Les économies imposées par le gouvernement De Wever-Bouchez sur nos salaires, le vol de nos pensions, la division et l’exclusion du chômage des travailleurs qui impactent gravement le fonctionnement des CPAS : les services publics sont attaqués de toute part,... Et au niveau régional et communautaire, le gouvernement MR-Engagés n’y va pas de main morte non plus, sabrant dans les emplois APE, attaquant les services publics, mettant en péril l’avenir de nos enfants en faisant des économies sur le dos de leur éducation, en s’attaquant aux allocations familiales,… et la liste risque de s’allonger avec les conclaves budgétaires en cours.

Nous vivons une attaque sans précédent sur nos conditions de vie. Cette austérité impacte directement les communes, notre ville de Liège et ses habitants. Les choix politiques posés par ces gouvernements de droite vont couler les travailleurs, qui sont déjà à 2 doigts de se noyer. À Liège, on n’en finit plus d’entendre des récits sur cette vie qui est de plus en plus dure, où les écarts de richesse se creusent de plus en plus, au détriment des travailleurs. 

Comme Cédric* qui va de mission en mission, un quart temps par ci, un remplacement par là, sans jamais savoir de quoi sera faite la semaine qui suit. Comme Léa*, qui enchaîne les CDD et qui paie près de 700 euros de loyer seule et qui se demande combien de temps elle va pouvoir encore tenir à payer sans craquer. Comme Florian* qui s’est déjà fait réprimander au travail parce qu’il n’arrive plus à arriver à l’heure depuis la nouvelle grille des bus, vu qu’il doit maintenant changer 3x de bus avant d’arriver aux portes de son travail. Comme Adil* qui décrit de plus en plus de tensions dans l’action sociale, car de plus en plus de gens sont angoissés et viennent vers eux, désespérés, mais il manque de moyens pour les accueillir. 

Et aujourd’hui, nous devons nous positionner sur un Plan Stratégique Transversal, certes louable, mais qui semble en dehors du temps, comme si Liège devait assumer seule toute l’ampleur de l’austérité imposée par les niveaux supérieurs. A peine, est-il rappelé que le plan de gestion et ses mesures d’austérité seront bel et bien appliquées et que la soutenabilité des finances communales doit être garantie. Le PST ne règle en rien les problèmes qu’on décrit ici, alors que c’est ça le quotidien des liégeois et des liégeoises. Où sont les actes forts de la majorité pour aller chercher les moyens nécessaires pour faire face à ces attaques antisociales sur le logement, le pouvoir d’achat, la propreté, l’emploi, les services publics, les pensions ? Nous avons besoin d’une position combative du collège pour aller chercher les moyens qui permettent de mener une politique ambitieuse qui défende les intérêts des liégeois et liégeoises. Qu’est-ce qui fait qu’aujourd’hui nous devons être à ce point en train de faire des économies de bouts de ficelles dans le PST, alors que la majorité communale a été constituée pour avoir des relais aux niveaux supérieurs ? Là, les relais, on ne les voit pas, on ne voit qu’un étau qui se resserre de plus en plus sur les conditions de vie des liégeois.es.

Logement 

Prenons le logement :  Le PST mentionne des actions pour "développer l’habitat pour tous les publics" (p. 33). C'est louable. Mais où sont les mesures fortes pour un logement abordable ? Vous constatez vous-mêmes dans ce texte que plus de 60% de la population est locataire à Liège. L’an dernier, l’augmentation des loyers ( +4,6% en Province de Liège) a dépassé l’inflation (+3,1%). Trouver un logement sans se ruiner ni mettre sa santé en péril est un vrai parcours du combattant. Devenir propriétaire c’est aussi un défi. On a déjà relayé dans ce conseil, cette année, les difficultés rencontrées par de plus en plus de liégeois, et en particulier les jeunes, à trouver un logement abordable. Trouver un logement une chambre d’une taille décente, avec balcon ou terrasse, ça représente entre ⅓ et ½ du salaire de beaucoup de locataires. C’est là qu’on voit les limites auxquelles sont confrontées les communes dans la gestion des locations. Où est la grille contraignante des loyers ? Que fait la région pour aider les grandes villes comme Liège à ne pas voir toute sa population contrainte de partir en périphérie en raison des prix trop élevés ? Quelles collaborations sont mises en place entre la ville et la région pour développer une vraie politique ambitieuse de logements publics ? 

En l’état, la Ville délaisse la bataille à mener pour un financement concret des logements publics et accessibles financièrement. Nous ne pouvons nous contenter de compter sur le bon vouloir des promoteurs pour intégrer des logements accessibles dans leurs projets. Comme vous, nous demandons que la Région wallonne finance de nouvelles constructions de logements publics et sociaux. Et il va falloir gagner cette bataille si on veut réellement répondre aux milliers de Liégeois qui sont encore sur une liste d’attente. 

Par contre, continuer à brader les meilleurs terrains publics pour les promoteurs immobiliers sans aucune contrainte de construction de logements publics n’est vraiment pas compréhensible vu la gravité de la crise du logement que traverse Liège. En plus de la plaine de Droixhe et du site d’Espérance et Bonne Fortune, viendront s’ajouter les grands projets de Fontainebleau-Bas-Rhieux et de LBP à Chênée. Imposer un pourcentage de kots sociaux de 10% dans les grands projets privés est une avancée positive, nous avons besoin maintenant de mener les mêmes politiques dans la promotion immobilière de logements familiaux ? Etonnamment, dans le PST, on ne mentionne même pas l’obligation nouvelle d’utiliser - pour tout projet de création d'au moins trente logements neufs -  de consacrer 40 % de la charge d'urbanisme au logement d'utilité publique. 

Heureusement, les projets de la Régie Foncière et de l’AIS viennent compenser cette absence de toute perspective de nouvelles constructions publiques. Et on espère particulièrement pour l’AIS que le personnel sera suffisant pour atteindre les 500 logements pris en gestion. 

Propreté 

La propreté de la ville est dans le top des priorités des Liégeois. Mais le PST ne permettra pas de répondre seul au défi de propreté auquel nous faisons face. Il nous faut des moyens supplémentaires, pas des coupes budgétaires imposées d’en haut qui ne comprennent pas la réalité concrète de la ville de Liège. Allez-vous utiliser vos relais régionaux et fédéraux pour obtenir ces moyens, Monsieur l’échevin de la propreté ? La fin de la collecte des encombrants, et la réduction du nombre de corbeilles publiques (on envisagerait 1000 corbeilles en moins), ce ne sont pas des mesures qui vont dans le sens de la propreté dans les quartiers. La propreté est aussi une question de moyens. Il faut plus de personnel pour la collecte et le nettoyage, plus de poubelles, et une présence accrue dans les quartiers. Nous saluons par contre l’ouverture de nouveaux recyparcs sur le territoire de la Ville et le développement du tri sélectif dans l’espace public avec entre autres l’enfouissement des bulles à verre.

Mobilité

Est-ce que les Liégeois, écoliers, étudiants, travailleurs, auront des bus pour se rendre en ville demain ? Le PST entend "développer une mobilité fluide et durable" mais la plus urgente et nécessaire action est encore sous forme de sollicitation : solliciter le TEC et l’AOT afin de restaurer les fréquences de bus dans les quartiers. Il va falloir prioriser cette action et se battre pour le retour d’un réseau de bus efficace et de qualité dans les quartiers. Et pour cela, on n’y échappera pas, il faudra sortir de la logique d’enveloppe fermée. Et je m’adresse aux Engagés et aux MR présents sur les bancs du collège : Quelles mesures allez-vous prendre maintenant, avec vos partis, au niveau de la région, pour répondre au besoin urgent d’un meilleur réseau de bus ? Vous nous dites que vous disposez de relais, il est temps de les actionner, maintenant. Les Liégeois n’en peuvent plus de ce réseau. Vraiment. L’arrivée du tram devait s’accompagner dès le début d’un financement supplémentaire du réseau TEC liégeois et d’un renforcement du personnel. 

Le développement et le renforcement de l’efficacité des transports publics est aussi nécessaire si l’on veut offrir une alternative à la voiture en ville. L’extension de la zone de stationnement payant est surtout une mesure budgétaire qui va chercher de l’argent dans la poche des travailleurs et non une mesure de mobilité. Pourquoi les parkings P+R ne sont toujours pas gratuits ? Leur usage va rester, on le craint, anecdotique et l’investissement consenti pour les construire va devenir incompris si on maintient les tarifs pratiqués aujourd’hui.

Pauvreté 

La lutte contre la précarité est inscrite dans le premier objectif stratégique mais où sont les mesures pour prévenir la pauvreté, pour parer à l’exclusion des chômeurs de longue durée qui va jeter des milliers de nouveaux liégeois dans la misère ? le PST se contente de mentionner des initiatives déjà annoncées : par exemple, les 30 lits supplémentaires à l’abri de jour, 60 en période de grand froid ; des actions au financement encore très hypothétique : par exemple le renforcement des dispositifs d’accompagnement des SDF via le Housing First et le Housing Led ; ou encore des actions au contour flou dépendantes de négociations à venir comme la mise en place de haltes-soins, intégrant un accompagnement sous contrainte pour les personnes dépendantes. Nous avons besoin d’un plan communal de lutte contre la pauvreté, de l'embauche de personnel pour les services sociaux, et du renforcement des dispositifs d'aide d'urgence et de soutien au tissu associatif pour assurer la dignité de chacun.

Défi environnemental

Demain, la ville de Liège sera-t-elle plus résiliente et plus adaptée aux changements climatiques ? Entre les constats dressés dans le premier chapitre et les propositions formulées dans le 5e objectif stratégique, il y a un gap certain. -55% de gaz à effet de serre d’ici 2030, c’est l’objectif déclaré. C’est aussi la date de la fin de cette mandature et l’échéance de ce PST mais où est le plan pour y arriver concrètement, pour mesurer les avancées ou les reculs vers cet objectif ? Où reste la rénovation énergétique des bâtiments scolaires dont plusieurs sont encore des passoires énergétiques ? Plusieurs quartiers sont identifiés comme à forte nécessité d’espaces verts mais existe-t-il un plan pour un espace vert dans chacun de ces quartiers ? La sanctuarisation de 2000 hectares d’espaces verts est une bonne chose mais la phrase sur la Chartreuse laisse la porte ouverte à une nouvelle urbanisation. Aujourd’hui même, l’Agence européenne de l’environnement (AEE) décernait un mauvais bulletin à la Belgique. Tout en reconnaissant des progrès, l’AEE souligne les « défis structurels » auxquels nous sommes confrontés. Les actions décrites dans le PST sont-elles à la hauteur pour une ville comme Liège ? Il n’est plus permis d’avoir des performances insuffisantes quand on a subi des inondations comme on en a connu en 2021.

Conclusion

Pour conclure, bien sûr plusieurs actions décrites dans ce PST sont positives et recevront notre soutien lorsqu'elles se traduiront en délibérations dans ce conseil. Mais sont-elles à la hauteur des crises sociales et environnementales que nous vivons ? Défient-elles le contexte d’austérité imposé par les gouvernements régional et fédéral ? Les Liégeois ont besoin de réponses à la hauteur de ces crises. Nous avons besoin d’un logement abordable, d’une ville propre, d’une ville sûre, accessible et fluide, d’une ville saine et agréable à vivre. 

La prochaine échéance déterminante pour obtenir un financement des grandes villes, et en particulier Liège, c’est la grande manifestation nationale du 14 octobre contre les politiques d’austérité que nous subissons et dont nous voyons tous et toutes les résultats sur les liégeois et les liégeoises. Ce sera une occasion d’y faire entendre la voix de notre Ville.  Nous disons stop et nous luttons contre les mesures d’austérité qui asphyxient nos vies de liégeois. 


Rafik RASSAA